Ballades en forêt : de Redding à Mokrice.

PJ La Valette 1Le tir à l’arc français et mondial me connaît surtout tel un archer du “tir à plat”, salle, FITA. Or, j’ai débuté ce sport par le tir instinctif, en arc à poulies, dans les bois du Vercors. J’ai toujours apprécié le plein air, la variété. Vu le programme international de la cible anglaise, le circuit en salle, le circuit des coupes du monde extérieures, en y ajoutant les championnats respectifs de référence, et bien entendu une vie professionnelle à côté, je n’avais pas la ressource pour profiter pleinement des compétitions dite “de parcours”. Alors, j’ai attendu avant de revenir à mon premier amour. Et voici que je découvre Redding en mai 2018, la compétition 3D américaine, maison du Big Foot.

“Quand tu fais Redding une fois, je peux t’assurer que tu feras tout pour ne plus jamais le rater”. Voilà ce que tu entends de partout lors que ton pied européen foule le sol de la Californie pour la première fois, un peu comme les dictons que l’on entend quand on parle du Nord chez nous, sauf que là, c’est pas le même paysage, smile. Redding SFOC’est vraiment Redding qui m’a donné envie de revenir à ma source, une compétition qui est tellement plus simple que notre vision des choses qu’elle encourage à se mettre sur le réglage de l’arc spécifique pour le multi-distances. Un an plus tard, je retourne à Redding en mai 2019. Une vraie frustration est née, car à mon retour en France, j’avais un goût de trop peu pour attendre une année de plus. Alors Pierrot, comment ça se passe pour toi, dans les bois ?

Nous partions directement de Medellin Séb et moi, notre médaille d’argent dans le sac à dos, direction San Francisco par Bogota et Mexico. Ce genre de voyage multi-destinations n’est jamais simple dans les aéroports, même en connexion inter, il faut parfois passer les douanes, puis les contrôles corps, puis les contrôles bagages qu’il faut reprendre sur le tapis pour les ouvrir et les reposer vers la destination suivante. Cette fois c’était un peu la totale, on a un peu couru. En arrivant à SFO, un air de liberté se faisait sentir, c’est ça les US baby ! On récupère le véhicule de loc’ et on met le cap sur le Nord de la Californie.

Redding feuUne immense vallée à traverser de part en part sur de longues lignes droites, des champs à perte de vue et les chaînes montagneuses délimitent le paysage jusqu’à Redding, CA. Nous arrivons dans cette petite ville ou d’apparence, tout est bien, tout est beau, comme dans les séries américaines où les jardins sont au carré, les maisons neuves et voitures impeccables. Redding 2019, c’est l’édition où les Straight Arrow Bowhunters ont fait face aux incendies qui ont ravagé la Californie. Les stigmates sont bien présents lorsque l’on s’écarte de la ville pour aller vers le site du tir. Les habitants ont eu très chauds, des flans de montagne sont noircis, des forêts dévastées, un paysage glaçant. L’ambiance n’en n’était que plus conviviale et humaine pour rendre grâce et honneur à tous les membres du club qui ont tout reconstruit. Nous étions là, pour notre bon plaisir, grâce à eux. Une fois sur le parking qui accueille aussi un peu de partout les caravanes et camping cars, notre Mercedes était, comment dire, petite !

Redding voiture

Avec un score de 1527 points sur 1540 possible, je termine l’édition 2019 dans le groupe des 46ème. Les scores sont très serrés et très hauts, normal, le Western Classic est une compétition où tous les archers doivent pouvoir s’éclater et prendre du plaisir. L’accent n’est pas mis sur la difficulté mais sur l’accessibilité. Je trouve que c’est très important, de nos jours. Je tire dans la catégorie “Money shoot”, la “championship”. Forcément, tous les cadors sont présents avec bien plus d’expérience que moi, gros noob du campagne. En revanche, cette fois, je ne me suis pas fait avoir avec mon troisième axe et des fautes de “tape” de distances. Grâce à mes potes qui passe plus de temps dans les bois que sur le tir à plat, j’ai acquis rapidement de l’expérience, un exercice de concentration intéressant à mettre en oeuvre. Pour mémoire, le Western Classic comporte soixante-dix cibles animalières en mousse 3D, se déroule sur trois jours, se tire sur trois parcours qui s’enchaînent dans une large boucle autour du point de rassemblement. Les règles sont simples : tout est permis à l’exception de : Pas de timing, mais la troisième flèche visée doit être tirée. Vous devez tirer les trois jours pour être classé. Le “skydraw” est interdit et disqualifiant (armement en hauteur). La vitesse de sortie de flèche est limitée à 300 pieds/seconde. Enfin, il faut que les deux flèches de la volée soient toutes deux dans le même animal.

Redding planRedding soleilVoilà, pas de peson, pas de radar, les contrôles seront effectués si les archers estiment que la vitesse est trop importante selon la résistance des cibles. Mais vu que les cibles ne tiendront pas le coup de toute manière, pas de contrôle. Toutefois, la règle est respectée. Pas de limite de temps, si une cible est en plein vent, on attend pour passer entre deux rafales. Les autres groupes attendent derrière, c’est l’occasion de manger un bon petit Hot Dog ketchup et de profiter du soleil et de son groupe. Vous pouvez aussi vous faire aider d’un archer de votre groupe pour qu’il tienne un parapluie ou un parasol, il protège du vent, de la pluie ou du soleil en pleine tronche. On pourrait se dire que ce n’est pas égal, alors que c’est tout le contraire : la même cible n’aura pas le même vent le matin et l’après-midi dans un couloir, le soleil ne reste pas non plus au même endroit toute la journée… Pas de triche sur les distances, elles sont en yards, mais on s’en fiche pas mal car tout le monde possède son télémètre dans la valeur de son choix, oui, c’est autorisé, et les distances connues. Reste à bien se préparer pour être précis, connaître sa balistique, et bien tirer pour le plaisir. La définition même du tir à l’arc, l’essence du fun, just perfect !

Les zones comptent 11 (dot de couleur orange), 10 (blessé), 8 (touché). Vingt-cinq cibles tirées chacun des deux premiers jours, vingt le troisième. Un shoot-off public est organisé à la fin pour départager les égalités du money shoot, sur les Elks placés à 88 yards (80,5m). Je rappelle les équivalences de diamètre du dot en fonction des distances :
Field prepRedding surprise

                •   2 cm : 2,70 m (nouveauté 2019),
                •   4 cm : de 3,65 à 17,37 m,
                •   7 cm : de 18,28 à 27,43 m,
                • 10 cm : de 28,34 à 54,86 m,
                • 13 cm : de 57,60 à 80,50 m,
                • 20 cm : 92,35 m.

La petite surprise 2019 était une cible placée à trois yards (1 yard = 0,914 mètre). Apposés sur le logo du club, deux dots oranges, ce sont en fait des gommettes ! Le réglage viseur est alors entre 50 et 70m selon notre détalonnage, il s’agit de la sortie de flèche directe de l’arc, la balistique n’a pas encore opéré, les règles sont un peu bousculées. Il convient d’avoir réalisé son réglage bien à plat à chaque yard. Alors comment procéder pour être si précis pour une fourchette de distances aussi grande entre 3 et 101 yards ? C’est un peu mieux que le pifomètre…

Je prépare tout cela bien à plat, par beau temps, cible au soleil. Je fais un réglage à vingt mètres, un autre à 80 mètres. Je cherche à grouper mes flèches en cible avant de marquer le réglage sur le viseur avec un trait au crayon de bois, et sur une note de mon téléphone, ou papier. J’obtiens une première plage de réglage pour choisir une tape. C’est quoi une tape ? Cela signifie autocollant en anglais, et dans le contexte, il s’agit de l’échelle de distances que l’on va placer sur notre viseur pour se repérer fonction de la distance de la cible en cours. En fonction de la distance, vous avez remarqué que votre perception de la hauteur de visette change, plus le scope se trouve bas, plus vous tirez loin, plus votre visette apparaît haute et cause du latéral en cible (placement de la main mâchoire / cou - ancrage souple / dur). Afin de limiter cette conséquence, il convient de déterminer la bonne hauteur de visette en choisissant la distance médiane. Globalement, nous sommes d’accord pour dire qu’elle se situe dans les 60% de la distance maximale.

Redding big footA Redding, elle est de 92,3m avec le Big Foot. Je vais donc chercher l’aisance et la précision optimale à 55m. La densité est plus importante dans les cibles à distance médiane pour cette compétition, dans les 35 à 60m. On favorise ainsi notre confort sur ces distances qui reviennent souvent. Et je m’entraîne à 55m sur le dot de dix centimètres de diamètre, le plus petit d’abord pour la précision, ensuite le plus gros de treize centimètres pour la confiance, à rechercher un groupement de furieux. C’est à ce moment là que je règle ma hauteur de visette, précisément. Je peux aussi intervenir sensiblement sur mon allonge, sur ma synchro, sur la longueur de mon Dloop et enfin, sur la sensibilité de mon décocheur. Une fois satisfait, je peux réitérer mon réglage 20 et 80 mètres que je remplace si nécessaire sur mes notes. Je mesure l’écart entre ces deux valeurs en centimètres à l’aide d’un réglet ou d’un pied à coulisse. Je rapporte cette valeur sur les tapes pré-imprimées comme il en existe sur les viseurs Axcel, et bientôt Arc Système. Je découpe et colle cette échelle de valeur sur mon viseur pour que les valeurs 20 et 80 correspondent au réglage en réel déjà effectué. Maintenant, je m’équipe de mon télémètre laser (Leica Rangemaster CRF 2700) pour vérifier les distances d’abord par dizaine, puis sur les valeurs intermédiaires en 5. Jusque là, ça colle au mètre près… PJ La Valette 2Et pour finir, je valide les valeurs extrêmes qui vont toujours changer un peu de la tape. On doit ajouter le paramètre appréhension de la distance (3 yards LOL, ou 101 avec le Big Foot, crazy !), l’exigence de la cible (comme pour le shoot off sur les Elks à 88 yards sur un dot de 13 !), et cela cause d’office de petites subtilités qu’il faut noter et garder sur soi. On en profite, tout est autorisé. Voilà, les campagnards vont bisquer, je viens de perdre les noobs qui me disent que c’est trop complexe. J’ai compris, je commence ici, et j’y reviendrai dans un bel article dédié, et en vidéo, ça sera plus clair ;-) Oui parce qu’après, y’a le troisième axe, les dévers et les pentes, les jeux de lumières, c’est vraiment cool tout ça !!!

PJ La Valette 19Comme je l’ai dit plus haut, cette fois j’ai réglé mon troisième axe. Grâce à mes copains des bois, j’ai acquis une méthode simple, rapide et efficace. J’en parlerai plus tard en illustration, c’est mieux. Avant tout réglage sur viseur, il convient d’avoir rodé son câblage, vérifié sa synchro, son entre-axes, entretenu son point d’encochage, ses tranche-fils et son Dloop. Si les modifs ne sont que l’histoire d’une aiguille de viseur à bouger, tout va bien, il ne faut pas avoir à décoller / recoller la tape sous peine de la voir se barrer lorsque nous serons dans les bois, à la chaleur ou à l’humidité.

Pour la gestion des pentes et des dévers, j’ai une méthode assez surprenante. Grâce à mon orienteur AS O’Block serré de façon à pouvoir le bouger à la force du bras, mais solide pour rester fixe en situation de tir, je déplace mon latéral en fonction de la cible. J’ajuste la balance de l’arc, et donc le point de pression dans le grip, pour chaque élévation de cible. Si elle monte, je remonte le latéral. Si elle descend, je fais l’inverse, et il faut en mettre beaucoup sans hésiter. Ce n’est pas du millimétrique. Pour les dévers, je bouge les masses vers le côté le plus haut de la pente. Ainsi, ma bulle reste au centre sans forcer sur mon épaule d’arc dédiée à la ligne de tir, mon point de visée est stable car mon point de pression est habituel, mes impacts sont précis car le réglage pente devient nettement plus proche de celui du réglage à plat. #RéactionnuméroUne : “oui mais Pierrot, on n’est pas expert comme toi, comment on fait nous” ? Je ne suis pas né expert, j’ai osé tenter les choses, et à force d’essayer, j’ai appris. Osez ! #RéactionnuméroDeux : “et si on tire avec deux latéraux on fait quoi” ? Bougez le latéral du côté de votre épaule d’arc pour corriger la balance d’arc sur les pentes, cela soulagera déjà votre point de pression dans le grip. Pour les dévers, rentrez le latéral du côté de la pente, vous serez vertical plus facilement. #RéactionnuméroTrois : “et comment on fait pour retrouver notre réglage de base ?” A force de jouer avec cela, votre réglage de base va évoluer, vous deviendrez plus précis, moins chatouilleux sur les détails. Vous saurez ajuster ce paramètre non pas au regard d’une graduation laser placée sur votre équipement, mais bien en fonction d’un ensemble : le câblage vit, il bouge en continue, votre point d’encochage, synchro, entre-axes et Dloop. C’est l’insidieux, celui que vous ne sentirez pas de suite. Votre latéral est la clé de voûte de votre stabilisation, sa position doit évoluer. C’est à cela que sert une stabilisation, et non à amortir ;-) J’y reviendrai dans un article bien technique comme on les aime.

Redding hot dogRedding poussièreOn est toujours à Redding, la division nationale arc à poulies est en cours à Riom, dans mon club. Cette fois, je suis très, très heureux d’avoir fait le choix de ne pas faire de tir par équipe en DNAP. J’en parlais dans cet article : Augias, épisode 3. (deuxième partie). Mais quel temps de M*** en France lors de cette compétition ! Et pendant ce temps, nous étions Séb et moi, en short-T-shirt-sunglasses bien au sec sous le soleil californien. Oui, quelques petites vidéos en mode branchade entre amis ont été échangées entre les USA et l’Auvergne sous la flotte, le froid et le vent. J’en rigole encore… Mais je ne comprends plus la DNAP, gouffre financier pour un club, et ses primes individuelles sur les qualifications. Non, je n’y arrive pas, même si de bons moments sont en mémoire, même si j’aime le tir par équipe, ça, je ne comprends pas. 500€ pour le premier des qualifs d’une seule manche, soit 1500 à 2000€ par saison pour l’individuel dans une filière d’équipe rien que pour la première place, 1000€ pour l’équipe championne de France après trois ou quatre manches, le retour sur l’investissement est un coup de bâton pleine tête. #Ettoutlemondesenfout.

Le tir démarre à huit heures tapantes, un bon gros coup de Klaxon retentit pour les soixante-dix cibles, comptant chacune une douzaine d’archers répartis en deux groupes A et B, a minima puisque l’évènement rassemble pus d’un millier d’archers. La journée est continue, les baraques à frites et Hot dogs sont disposées un peu de partout pour faire le point miam et boire frais. Le parcours est simple d’accès et à arpenter pour que tout le monde en profite. Cependant, certaines cibles restent vraiment difficiles, elles peuvent être en plein axe du soleil en fonction de l’heure, ou en plein couloir venteux, ou bien technique du fait du pas de tir, de son inclinaison et tous les trucs qu’on aime quand on est campagnard. J’ai encore beaucoup appris sur cette compétition, j’ai commis des erreurs de tir, tout était bien sur le réglage et j’en suis satisfait. Sur la prochaine édition, je serai encore plus fin sur mon approche du tir, et toujours aussi exigeant sur mon équipement. Il me tarde d’y retourner, c’est un moment exceptionnel, du vrai bon tir à l’arc dans une superbe ambiance !

Redding echauff


Stand ASLes championnats de France à Riom sont terminés, et plus tôt dans la saison je recevais une demande de partenariat pour soutenir le championnat de France de tir en campagne à Artonne-Saint-Myon, en Auvergne. Cela fait partie de mes attributions chez Arc Système, avec le sponsoring, les partenariats, l’image. Nous avons accepté ce soutien à l’organisateur, qui en échange nous a attribué un emplacement pour tenir notre stand de marque. Durant tout le weekend, Mathieu, le designer AS et moi nous relayions pour tenir des conversations techniques et professionnelles avec les archers de toutes catégories S2 et S3, mais aussi amicales parce que nous ne sommes pas des bêtes. Passionné de tir à l’arc mais aussi de photographie, je demandais à l’organisateur si je pouvais de temps en temps prendre une pause du stand pour aller shooter quelques clichés des archers sur le parcours. La réponse était positive, et ainsi, je me retrouvais accrédité photographe officiel de la FFTA et arborant un magnifique chasuble orange fluo. Ca, je ne pouvais passer inaperçu c’est certain ! C’était amusant de voir les réactions des archers, si je cherchais à être discret le plus possible malgré mon placard orange, ils ne pouvaient m’ignorer. Je prenais de la distance, je montais mon gros machin qui fait des photos de loin pour capter ce que je voulais mettre en valeur, ou bien l’ultra grand angle pour situer le contexte superbe du domaine royal de Randan. J’ai pris mon pied, clairement, à faire ces photos. SelfieCertains archers jouaient le jeu, je les en remercie, car une fois en cible je leur demandais s’ils voulaient bien me faire un beau sourire, ce qu’ils ont fait. C’est bien pour notre sport, notre image, on ne fait pas toujours la gueule ! D’autres pouvaient ressentir une certaine appréhension à mon approche, ou encore de l’étonnement… Il est où ton arc Pierrot ? Ce jour, c’étaient eux les stars. Focalisé sur ma volonté de faire du beau sans gêner les archers, j’ai découvert un autre univers qu’il est difficile d’arpenter. Se placer alors que des archers doivent se concentrer n’est pas chose aisée, prendre une belle photo qui mettra en valeur nos qualités, nos armes et nos gestes pour qu’elle plaise, n’est pas facile non plus. Toutefois, entre partenaire et reporter, j’ai pris bien du plaisir et je crois qu’il a été tout autant apprécié. Je pense bien que je pourrai par la suite reproduire l’opération, avec encore plus de plaisir et de qualité. Là aussi, il est question d’expérience ! Entre sport et pro, ma vie estivale aura été bien remplie. Lien vers mes photos de Randan.. (Si vous souhaitez recevoir un exemplaire haute définition, c’est tout à fait possible, écrivez-moi par la messagerie du site et je vous enverrai cela bien volontiers).

presentation du dahutAvec une telle expérience, loin de toutes les tergiversations du tir à plat, ses règles, ses contraintes, ce sentiment de liberté dans l’expression du tir est vécu tel un moteur que l’on débride. Les premiers tours de circuits sont retenus, le temps de prendre un peu confiance, avant de se lâcher complètement. Quel plaisir… Comment allais-je aborder le tir à plat ? Les deux s’associent à la performance, on apprend des deux. L’un sert la régularité et la précision, la stratégie mentale, l’autre sert notre capacité à nous adapter, la finesse du ressenti, l’estime et la rigueur de la préparation. J’ai plus de poids du côté FITA, et je veux équilibrer cette balance. Mon problème, à ce stade de la saison, est que je suis engagé sur toutes les compètes inter à plat, je n’ai pas une minute de répit après ma récréation californienne. J’ai remporté de belles médailles contées dans les carnets Rattrapage ⅓. Rattrapage ⅔. Rattrapage 3/3. , la saison plate va stopper tôt. On me parle du campagne, souvent, on me pose des questions, “et quand est-ce que tu viens ?, voici notre mandat pour le campagne du …?, tu me récites ta leçon sur tes équivalences distance /taille de blason” ?.. La graine a été semée, elle a poussé. On me parle de Sylvain Renard, ex-chasseur-alpin, drôle pour un goupil que je surnomme affectueusement mon chasseur de lapins. Il possèderait un terrain là-haut, dans la montagne en Haute Savoie. Il serait THE technicien du parcours, le réputé monsieur j’te colle des cibles de furieux, monsieur je vais t’en faire baver mon gars, monsieur efface ton sourire, le Chuck Norris du fromage qui coule, même les pentes ont peur de lui ©tontonMo… On dit qu’il a reçu “carte blanche” pour dresser le parcours de la sélection en équipe de France campagne à Barby, fief du dresseur de Dahut, Sylvain le terrible. Mmmm, “et si on passait un p’tit weekend ensemble mon poto de là-haut ? Allez…”. Nous sommes en fin de saison FITA, revenu de Berlin avec cette magnifique médaille d’or, il ne reste que le France FITA. La décision est prise, il sera d’autant plus dur de poursuivre l’entraînement à plat. Alors je commencerai mes réglages après Riom.

Barby accueilToute fin juillet, je reprends mon Hoyt Prevail 37 SVX de Redding. Je dois l’ajuster, sinon le peson va clairement faire la tronche. Je replace ma puissance à 60 poneys plus ou moins 5 à 6 livres selon la précision extrême de nos pesons, je retouche l’allonge et la hauteur de visette car la distance maximale sera moins importante de trente mètres. Je révise mes leçons de distances, d’équivalence blasons, les astuces de correction des pentes, des lumières et toute l’encyclopédie du campagnard astucieux à qui on ne la fait plus, l’entourloupe de la cible sournoise. J’aime bien ce moment, ce blason jaune et noir au contraste marqué, l’idée de chercher la petite bête à plat, sachant que des difficultés supplémentaires vont arriver sur le terrain. Je bosse mon estimation interdite qui ne l’est pas vraiment, puisqu’elle est autorisée sans l’être, pour être au niveau de mes adversaires sur les cibles inconnues. Sur les corrections de pentes, on verra bien sur place, j’ai un bon pif, et un O’Block.

Barby paysageJ’arrive donc sur cette compétition, qui est une sélection en équipe nationale. Ma toute première, le matériel est monté, il faut grimper jusqu’au site maintenant. Chemin faisant, ballade en forêt, on respire. Des cibles sont apposées et l’odeur du café se mêle à la senteur du sous-bois. On peut tirer quelques flèches pour se sortir du plumard avant d’être répartis par peloton. Je me retrouve avec les copains, le message est clair : je ne veux recevoir aucune aide, commettre mes erreurs, me planter si nécessaire, au moins, je m’en souviendrai ! Bon, le souvenir restera longtemps c’est sûr ! Le coup de sifflet retentit, c’est parti. L’engagement n’est pas le même qu’à plat, on oublie la pugnacité au bénéfice de l’observation. Cette concentration doit tenir jusqu’au bout pour éviter l’erreur. Tout commence bien, défiant la gravité et la complexité des cibles de Sylvain Norris, je dépasse la moitié avec 205 points. Le quota de sélection est à 410. Barby ombreToutefois je reste sur l’évènement sans projection, j’apprécie le cadre bucolique, l’ambiance conviviale d’un groupe, des autres groupes avec lesquels nous ne pouvons échanger que brièvement. Il ne faut pas révéler de secret d’état sur les cibles, on ne sait jamais, chuuut. Quelques cibles plus tard, je me suis fais baiser, royalement, tel le noob de base confondant une 60 avec une 80. Ce sont ces deux tailles de blasons dont les perspectives se mélangent aux distances, quant à elles successives. Je tape dans le 1 bien en bas. Merdeuuuu. Je corrige de suite, deux belles flèches toutes deux pleine balle dans le 6. Je perds cinq points sur une cible, je ne suis pas en compétition contre un score ou un adversaire, mais bien contre le terrain et sa technicité. C’est ça qui est vraiment top dans cette discipline ! Et on change de cible, l’air rageux de celle que je laisse derrière. Barby 50On file dans les bois, j’imaginais cette partie moins anguleuse, moins complexe, raté. Nous venons de passer un birdie 10m bien chiadé à 25/30°, une 80 marquée 50m réglée viseur à 43m, une gaz’ pente et dévers où les lignes se croisent, une ombre et lumière bien tordue, le pire est passé, ça va aller. Ben non. Les pas de tir sont pénibles à négocier, surtout quand on connaît le confort d’un terrain de foot. Heureusement, une information avait fuité : il fallait obligatoirement de bonnes godasses. J’avais prévu le coup, j’étais à l’aise dans mes souliers, je pouvais gratter mes empreintes pour trouver les bons appuis avant d’attaquer ma proie. Encore quelques cibles plus loins, le physique un peu plus mis à l’épreuve dans les chemins en-haut-en-bas-assis-couché-debout, ma caboche vascille, je m’impatiente, le FITA sans doute. Une gaz’ arrive, le premier binôme commence, le mien est forfait, je poursuis la compétition seul sur mon pas de tir. Je ne vois pas le danger imminent et je me trompe de hauteur de cible dans ma colonne. Les deux blasons étant libre, je tire le premier venu. Faute. Merdeuuuu, je m’en aperçois. Et c’est un 3 haut. C’est une inconnue, pour moi, elle est au taquet, donc à 30 mètres. Je tire le bon spot en minorant ma distance, cet impact n’est pas très cohérent mais je suis surtout sur ma grosse erreur. Et PAN, faute n°2 ! La gazinière inconnue est à 25 mètres maximum gros boulet !!! C’est cette deuxième flèche dans le 4 en haut qui me l’indique, là, ma cervelle a connecté, enfin. Je règle ma dernière flèche, et c’est enfin un 6. Huit points de perdus, soit 13 points en deux cibles. Ca m’énerve !!! La suite, c’est le pugnace qui a causé, quasi perfect jusqu’au bout. Score final satisfaisant avec cette difficulté niveau légende, 392. Stéphane revient avec un 393, Fabien 395, Adrien 400 points. Les quatre premiers du classement continuent pour les matchs. J’en suis !

Les matchs sont réalisés en modules de six cibles, puis en module de quatre cible, en échelle. C’est-à-dire : un match dure six volées, une par cible d’un module. Le quatrième rencontre le troisième des qualifications. Le vainqueur rencontre le second, et ainsi de suite. Les distances sont désormais connues, les difficultés amoindries, ça sent déjà les gros scores. Je remporte mes deux premiers matchs contre Stéphane et Fabien. Un mano-a-mano est tiré contre Adrien, ça matche au taquet. Dernière cible, le mec me colle 18 sur le satané birdie 20m, je tire 16, deux cordons ne prennent pas. Youtube / Le Boulet. Une pause plus tard, le dernier module prend place à la vitesse de l’éclair savoyard, quatre cibles, on prend les mêmes et on recommence. J’ai marqué quelques points déjà, et je me suis bien fait plaisir à découvrir cette nouvelle expérience. Là encore, même combat, victoire sur les deux premiers, et défaite contre Adrien. Il devait en avoir encore gros sur la patate, de ma victoire à Riom, pour m’en coller deux de suite. Du beau tir à l’arc. Les jeux sont fait. Nous entendons la musique habituelle, “le comité de sélection se réunira demain pour décider des archers qui composeront l’équipe de France pour les championnats d’Europe”, et chacun retourne au décrottage des chaussures. J’ai adoré ce moment, une légère frustration demeure à manquer d’expérience pour profiter du site à 101%, mais quel plaisir, quelle expérience ! Pour la sélection, je n’ai pas trop d’illusion, sincèrement, des archers très expérimentés sont très proches de moi, je termine deuxième, mais la fédé va t’elle envoyer deux archers par catégorie ? Le deuxième sera t’il un expérimenté ou bien un noob ? Je ne savais pas, n’attendais rien. Et puis le téléphone a sonné, pour m’annoncer l’inédit : j’en serai avec Adrien et l’équipe de France pour Mokrice-Catez en Slovénie ! Nouvelle aventure, première semaine d’octobre, pwaaaa ! Merci mon p’tit chasseur de lapins, elle était cool ta compète, un peu facile mais cool #tefâchepas.


 

Coutances séminaire

PJ La Valette 14Au programme suivant ce bon weekend inédit, un stand Arc Système et des séminaires programmés pour la FFTA sur la coupe de France à Coutances. Une bien belle opération de services et de conseils. J’ai pu côtoyer JC Valladont dans des séminaires communs, et m’exprimer devant des archers avides de conseils. Car en effet, la coupe de France concerne un niveau de tir plus modeste, une population en progression, en quête d’une meilleure technique, d’une plus grande finesse de réglage, d’un choix plus précis sur le matériel. Les retours de cette compétition ont été très bons, du soleil, un village de partenaires, un beau terrain, on a jamais vu autant de Normandie d’un seul coup d’oeil tout au long d’un weekend #moqueriedesudiste. La tente AS n’a pas désempli et les séminaires ont été dynamiques et populaires. J’étais content de prendre sur mon temps libre pour rendre service, il vous a été offert par Arc Système, Hoyt et Easton, mes partenaires qui me permettent de programmer des dépenses pour mes déplacements. Comme quoi, cela a du bon d’investir dans les vraies grandes marques, au final, on y gagne. Et si toutefois vous n’en n’étiez pas encore convaincus, cela viendra bientôt sur ce site.

PJ La Valette 1SanguinairesLe voyage international n’est pas encore là et j’ai du temps pour me préparer, et prendre une semaine de vacances, le grand luxe. Je décide d’aller en Corse, en passant par Toulon. “Pas con le gars, il avait un plan en fait”, se dit #nanakidéchire. J’avoue. A côté de Toulon, à quelques encablures de mon ancien loft de 24m2, se trouve le club des archers valettois. La Valette-du-Var, les cigales se donnent en concert H24 en été, les senteurs du Sud… Un terrain de tir 3D et campagne permanent se fait discret sous les pins au pied du mont Coudon, et avec coach Domi des archers gardéens, l’accord est donné pour que je puisse parfaire mes angles. Ainsi passais-je un moment hors du temps à me délecter d’un tir à foison sur chaque cible entretenue par ce club. Pendant ce temps, coach, lui jouait du Fuji pour immortaliser l’instant. C’était bien, je pensais qu’entre le vendredi après-midi et le samedi matin je croiserai du monde sur une telle aire de jeu, mais non. Où étiez-vous les valettois ? A la sieste ? Oh fatche ! Ca m’escagasque ! Prenez soin de cette pépite, ce terrain est un joyau que vous devez préserver. Merci Claude pour ton accueil, et pour avoir blasonné avant mon arrivée. I’ll be back !

Lecci merOn roule dans le bateau jaune, on largue partout, machine en avant lente pour quitter la petite rade, puis la grande rade sous les fenêtres de ma bonne vieille vigie Cépet, retapée, gardienne de la presqu’île de Saint Mandrier et dernière affectation de marin avant ma situation d’aujourd’hui. On monte en allure pour laisser Porquerolles, sa fourmigue et le Grand Langoustier sur bâbord. La traversée me fait du bien, je retrouve la mer et ma philosophie, un langage commun, connu. Les îles sanguinaires se dessinent au-dessus de la ligne d’horizon et voici le golfe d’Ajaccio où s’abrite le centre de sauvetage en mer, à Aspretto. C’est ici dans ce hangar hélico où j’ai fait mes premières armes pour décrocher ma première sélection en équipe de France. La suite est en vacances, l’arc reste tranquille quelques jours jusqu’à la compétition de Lecci, terre de Robert et Sophie, les deux insatiables du tir à l’arc de parcours. Après les aiguilles de Bavella et Golfo di Sogno, les deux inséparables qui s’engueulent autant qu’ils s’aiment choisissaient un nouveau parcours, en pleine terre, plus rustique cette fois. Le 4x4 est de rigueur, je ne passerai pas avec mon kart. J’utilise donc mes jambes pour me rendre sur place, je croise les cochons sauvages, des animaux bizarres (paraît ce sont des corses, mais bon), et des chevaux en liberté. Lecci ChevalC’est là. J’ai une petite cible à dispo, je tire à plat pour faire mes distances aller et retour. Une heure plus tard, je stoppe. La compétition sera le lendemain. Merci Robert, et à ce soir pour le dîner. Et oui, en Corse on fait ça, un dîner tous ensemble chez notre hôte qui nous invite tous contre participation. Les années où foule il y avait, c’était organisé à la salle des fêtes, ou bien à la pizzeria (encore un Doumé il me semble). Bref une ambiance légère, dépaysante, la vie qui va bien.


La météo annonce du beau, et du vent. Nous serons en plateau de colline vue mer donc, certaines cibles seront pénibles. Et le Robert, il a bien choisi comment il allait nous faire bisquer le salopiaud ! Premier jour, 405, record battu ! Et oui, avec ma petite expérience, je n’ai pas encore de gros score de ouf. Avec ce petit vent, j’en suis très content, et je suis motivé. Sauf que, j’ai oublié un truc de base : je ne me suis pas entraîné, donc j’ai le dos et les épaules bien raides au petit matin du lendemain. Cette fois le vent est bien présent. Qu’importe, en campagne si des cibles sont pénibles, on se dit qu’une fois n’est pas coutume et que la prochaine sera plus abritée. C’est cool ça.Mok invicta J’attaque mal mais termine vraiment bien sur un parcours long, les cibles au taquet voire un peu plus que leur fourchette normale, hein petit filou de Robert, pour 395. Ca passe, fin de l’épisode campagne en Corse, il me reste quelques jours pour déguster un bon Cap Corse, faire une partie de pétanque et de belles photos. L’anecdote : chez des amis corses dont je tairais le nom pour garder l’anonymat le plus total, nous jouons à la pétanque. Mon pote, il a “la gagne”, il ne supporte pas de perdre, il veut gagner, tout le temps. Moi, joueur, alors qu’il se concentre pour dégommer ma boule proche du cochonet, je laisse tomber celles qui me restent en main tout à côté de lui, ce qui a eu la conséquence évidente de le mettre en pétard. Quelques instants plus tard, c’est à mon tour de pointer, je me concentre tant bien que mal, je n’ai pas la gagne de partout, donc tranquille, vacances.

Au moment où j’initie mon geste fragile et incertain pour lancer ma boule à peu près dans la bonne direction, retentit un énorme bruit soudain BAAAAAAM juste derrière moi. Ma boule est partie quelque part, mais où ? On s’en fout : il venait de tirer un coup de fusil, un mètre derrière moi, canon en l’air. Ces gens sont fous ! La douille se trouve à côté de mes médailles, dans ma vitrine Wall of fame. Sacré corsicains, merci pour votre accueil, c’était cool de vous revoir après toutes ces années ! Mais j’ai fait un sacré bond avec sa connerie, le boulet !

les corsesFin de la séance détente et préparation, retour sur le continent. Remise en jambe pour le travail, et pour l’entraînement. Alors l’entraînement en tir campagne, c’est assez pénible à plat, voire chiant, clairement. J’ai donc fait des séries sur chaque distance comme par exemple dix volées de 12 flèches sur une gazinière complète, trois flèches par blasons, à la distance maximale. Et pareil pour chaque taille de blasons. Au moins, je tire un certain volume. Si les conditions ne sont pas idéales, alors, je me rapproche pour entretenir la confiance et bosser la coordination. Là, ça devenait intéressant plutôt que de changer tout le temps de distance. Un truc arrivait cependant : mon nouvel arc, celui sur lequel j’ai bossé dur en collaboration avec la firme américaine de Salt Lake City, l’Invicta. Je l’avais commandé en 40 et en 37” d’entre-axes, et comme un signe du destin, c’est le 37” qui est arrivé le premier. Son bleu satin est magnifique, ses galbes me séduisent, ses branches noires mates sont rock n’roll pour aller dans les bois, il faut que je tire dessus. Le mal était fait. Je monte l’arc et le prépare le lundi après-midi, le départ pour Paris est prévu jeudi soir. Ce n’est pas du tir à plat, il faut vraiment tout préparer de A à Z, et refaire une tape. Le tir de l’après-midi était stratosphérique, je ne laisse pas aller à mes émotions, la nuit porte conseil. Au lendemain, je tire les deux arcs, mon Prevail et le petit nouveau. Sur chaque situation, cet Invicta gagne, c’est décidé, en deux entraînements, j’avais fait mon choix. 


 

 

Mok salutUn stage équipe de France est prévu avant le championnat, directement sur place. Nous nous retrouvons tous dans ma seconde maison, l’aéroport CDG. Je découvre d’autres visages, y’en a plein que j’ai déjà vu, oui mais en photos. Je connais leurs palmarès mais pas leurs histoires. J’étais un des nouveaux dans cette équipe qui a déjà vécu de belles choses sur d’autres championnats dont les contes seront illustrés en semaine ensemble. Je me revois sur ma première sélection internationale à Izmir, pour les championnats du monde en salle en 2007, avec tous les cadors de la team France. C’était amusant. Profil bas, je dois apprendre, mais j’ai aussi plein d’astuces à transmettre, il y a toujours du bénéfice à prendre d’un regard neuf, tout comme l’expérience nous dépatouille souvent. Mokrice-Catez, Slovénie, un peu d’avion, un peu de bus, on trouve l’hôtel et dodo. Le stage démarre sur un champ tout plat avec quelques cibles disposées pour nous. Nous sommes tranquilles le premier jour. Au deuxième jour, beaucoup moins, nous n’étions pas les seuls à avoir eu cette idée. C’était un peu la guerre pour se faire une place, mais ça, pas besoin d’être campagnard, le fitiste sait très bien faire, il a l’habitude de jouer des coudes sur les World Cups, notamment avec les indiens qui ont un sens inée de la proximité humaine. Le stage tourne très vite au “DMTTS” que vous connaissez d’après mes derniers carnets, soit le “DémMerde Toi Tout Seul” pour ceux qui se réveillent. Au final, tout va bien, rien ne sert de trop en mettre. L’entraînement officiel commence sur le golf du château de Catez, un bel endroit, arboré, super green, la météo est sympa, tout va bien. Le terrain d’entraînement est une pente montante sur le practice du golf, cible juste au-dessus des yeux. Il faut majorer la distance d’un mètre dans ce cas, ma tape est nickel, je ne change rien et je profite, j’adore cet angle qui appuie l’arc dans l’épaule sans force. On voit bien voler la flèche dès sa sortie d’arc, je respire.Ent officiel 2

Nota : vu que le téléphone est interdit, tout comme les appareils photos hors argentique, j'ai pris les photos que j'ai pu trouver sur le site de la World Archery Europe. Sachant que d'autres peuvent circuler mais ne sont pas gratuites, attention donc, ces photos doivent rester en accès libres ;-) Mais cette règle est définitivement pénible... Je ne trouve pas les photos souhaitées pour illustrer, dommage, de belles cibles étaient à montrer #faitessimple.

Premier jour de compétition, le jour des inconnues. J’ai eu jusque là douze inconnues sur mes parcours, j’en aurai vingt-quatre aujourd’hui ! Je révise mes leçons, mon matériel est prêt et conforme au règlement international que j’ai bien potassé (je n’aime pas être pris en défaut, et si je veux râler, autant bien connaître les choses pour ne pas passer pour un débile). Terrain chauffeLes choses sérieuses commencent. Je sais qu’un blason de 80 se confond facilement avec un 60, je me souviens de Barby, je n’ai pas eu de soucis à Lecci, tout va bien aller ici en Slovénie. Ca fait beaucoup de i. Je lis le team booklet qui annonce que “différentes tailles de cibles seront utilisées”. Les malins… Comme ça on sème bien le doute pour différencier le 80 du 60 hein ! J’ai donc l’info, je marche vers la première cible. Je la détecte au loin, nous arrivons de côté, je distingue une distance mais je n’ai pas l’habitude de cette approche, le doute s’installe. C’est la première cible, dans le peloton, le silence est roi. La glace n’est pas encore brisée, pourtant, je les connais tous, une journée sympathique s’annonce. Le blason ne couvre pas toute la cible et il est vierge de tout impact, je ne connais pas cette marque. Je regarde à la jumelle mais elle ne me paraît pas si loin. Le relief bombé renforce le doute. Ca commence, je confirme mon réglage d’une 60 taquet 35m, Mario tire le premier, je perçois son vol de flèche beaucoup trop long pour une 35 mètres, pan, je décoche, merdeuuuuuu, c’était une quatre-viiiiiiiingt, bouléééééé ! Bon, là, la première flèche de la première cible de la première inter en campagne est marquée au fer rouge !!! C’est une brosse en bas. Six points de moins dès le départ. J’en rigole encore, mais quel idiot !!!

Je tiens bon la journée, qui a été longue avec ses vingt-trois cibles suivantes et cette première flèche demeurant en tête. Score final du premier jour : 405, 18ème place. Le parcours était vraiment facile, seules quelques rares difficultés n’étaient pas si ardues, elles ne l’étaient qu’en comparaison du reste du parcours, easy. Mok QRPas d’angle démesuré, pas de jeu d’ombre, distance courtes, le bon score eut été un 415. Domagoj, vainqueur de Redding, fît parler la poudre avec un stratosphérique 422. Je sors de cette journée avec une belle anecdote, qui a bien fait rire. Le noob est à sa place, tout va bien.

Le lendemain, les connues. Le sournois pouvait rendre le parcours d’inconnues facile, pour renforcer le sentiment de difficulté sur les connues aux distances d’office plus importantes. Le sournois pouvait aussi laisser les distances les plus courtes aux pas de tir les plus faciles. Et le sournois pouvait, définitivement placer les plus longues distances sur les cibles les plus techniques et les plus difficiles. Et c’est ce qu’il a fait, le sournois !!! Si le premier jour laissait un goût de simplicité, voire d’une certaine frustration pour ce niveau de compétition européen, le deuxième allait venir contre ce sentiment. mok birdieLe parcours rouge contournait le château, certaines cibles bien à plat étaient les plus faciles, aux distances les plus courtes, comme une 80 à 35 ou 40 mètres par exemple, ou bien le birdie à dix mètres tel qu’on le tire dans son jardin. Mais le sournois avait bien pensé son oeuvre, pour nous offrir de beaux angles, de beaux jeux de lumière bien trompeurs, et des dévers bien pénibles à négocier. Une des deux 80 à soixante mètres se trouvait gros temps dans la pente, réglée à 53, j’étais toujours haut dans le 5. Le satané birdie 20 se trouvait à dos de colline, en plein couloir venteux, à un bon 20°, les pieds dans la pente, une vraie saloperie. Pas de tir en plein cagnard, sol clair, réverbération maximale, les gazinières se cachaient dans l’ombre des arbres, tapies au fond des bosquets. Ce jour de tir des connues, j’ai pris beaucoup de plaisir à matcher avec les autres concurrents, à rester concentré tout au long de la journée. Les distances connues devaient recevoir toutes ou presque une correction viseur, et une astuce de tir à la mode campagnarde. J’ai a-d-o-r-é. Score final, ça paie, 406, 5ème place. Indice de précision intéressant puisque seuls deux 4 venaient se glisser sur la feuille de marque. Mes X10 Protour ne parvenaient pas à toucher le cordon 6 à moult reprises, agaçant, mais toujours plus sympa que de les coller plein 5 ou cordon 4. Ce score me fait bondir au classement, la gagne du jour est à 415 (Domagoj), encore un bon indice, car les suivants réalisent respectivement 412 (Mike), 410 (Enzo) et 406 (Njaal). Je ne suis pas à la traîne, c’est cool.Tableau ER Mokrice

C’est un peu à ce moment-là que mon esprit du jeu s’arrête, car la suite ne m’aura guère plu et convaincu. Le format des matchs a récemment évolué. Sans être un adepte du “avant c’était mieux”, et bien, avant, c’était quand même mieux. A savoir, que les archers se rencontraient en poule par module. La moitié haute des scores passait au tour suivant, et ainsi de suite jusqu’en demie finale où l’on trouvait les duels pour départager le match pour l’or de celui du bronze. C’est très résumé, mais en gros, c’est ça, et je trouve que c’était sport, et surtout différent du reste que l’on trouve déjà trop sur le tir à plat. Avec le “nouveau” système qui n’est en fait rien d’autre que celui du tir à plat, on prend tous ses défauts et on les rapporte dans nos campagnes. Les matchs les plus disputés laisseront un performeur sur le carreau, tandis que les matchs les moins hauts vont permettre l’accès au tour suivant. On a déjà ça en FITA et en salle, on ne l’avait pas en campagne, et maintenant, il est de partout, ce système qui autorise la contre-performance. Alors oui on peut dire que c’est aussi un format d’opportunité, qui laisse de la place à une erreur. Bon, ce n’est pas ma position, et je vais prendre un exemple : ma compétition à Catez…ER2

A l’issue des qualifications, je remporte ma place dans l’équipe avec Jean-Charles et David. Adrien est placé en-dessous au classement. Mais le teigneux allait se refaire… Avec l’alignement des astres, d’après Hopkins le quantique, et les indications du pendule, nous serons tous deux dans la même poule. Oui, parce que ce n’est pas un tableau direct, toutes les cibles ne sont pas les mêmes, de taille et de distance identique. J’vous l’ai dit, c’est super simple ce nouveau système. Les matchs se basent sur le tableau de qualification, à peu près, un premier match commence et le vainqueur passe au tour suivant contre celui des qualifications classé plus haut. Comme au Lancaster Classic, mais en moins bien. Adrien remporte ses matchs, les deux premiers, je suis le troisième adversaire en liste de la poule, nous nous rencontrons. Il est chaud-patate le Dridri, c’est cool ! Sauf que j’attends qu’il ait fini son truc pour attaquer le mien, qu’il fait un froid de sa maman en jupette sur la banquise et que j’attends depuis une heure et demie que mon tour vienne enfin, dans le sous-bois, à l’ombre, au petit matin bien, bien, bien humide. Ce moment tant attendu arrive enfin, je me lève en laissant trois vertèbres lors de mon ascension verticale. Je fais quelques mouvements lents pour me remettre d’un échauffement si lointain que mon esprit pointe la veille dans le calendrier. Il y avait beaucoup de retard ce jour-là, le nouveau format n’était pas encore au point, on peut le croire, il en deviendrait presque plus complexe que le code du travail en France. Quelques mouvements plus tard, j’étais assuré de ne pas perdre trois doigts dans mon décocheur dès la première flèche. Au regard des cibles des différents modules, cela n’allait pas être trop dur d’entrée de jeu. Une sorte de grand cirque rempli de cibles et des piquets. Sauf qu’un détail m’avait échappé, il s’agissait du module CC (casse-cou***) : on attaque avec le birdie 20, à sec (sauf qu’Adrien est chaud lui). On poursuit avec une gaz’ 30. Arrive la 80 à 55m et enfin, la fameuse et délicieuse 60 à 45m. Autant vous dire que, à froid, ça picote un poil. Le match est superbe, ça matche, je tiens le coup malgré un 4 sur ce fichu birdie 20 (non j’l’aime pô lui). Sur un maximum de 108 points, soit après six cibles et dix-huit flèches, Adrien tire 102 points, et moi, un point derrière. Je tire un tas de “pas loin pas dedans” à l’image de mon second jour de qualification. C’est le plus gros match, sur le module le plus chaud, j’ai pris un plaisir monstre et je dois quitter la compétition avec mon score plus haut que tous les autres. Pas de “c’est ça le sport”, non pas là, car le sport a été modifié et les règles étaient plus justes avant que ces duels n’arrivent, chamboulent, et offrent bien moins d’attrait et de valorisation de la performance. Mok ER teamJ’adore le campagne, mais ce format, pas du tout, il est frustrant, long, complexe et trop proche du format à plat. On me dit que la médiatisation est plus facile dans ce format, d’accord, mais, le média ne mettra pas en valeur les meilleurs compétiteurs du plateau s’ils se rencontrent avant les finales, donc l’image n’en sera que moins valorisante. Et ensuite, va comprendre le système… Déjà en étant concerné ce n’est pas évident, alors du point de vue d’un spectateur… Bonjour les dégâts. On m’a posé la question, la World Archery Europe, et j’y ai répondu clairement. Il n’est pas question de râler dans le vent, non, je garde un oeil constructif sur la chose. On m’a assuré que l’essai n’était pas transformé, et qu’une évolution serait encore proposée… Wait and see, nous verrons. En tout cas, chapeau à l’organisation et au staff, parce que c’était bien capilotracté comme truc. Je termine donc été éliminé au premier tour avec le second meilleur score, le premier étant celui d’Adrien qui ira ensuite remporter le bronze. Bravo copain, c’est cool, et c’était bien tiré.

Je passe sur le règlement campagne, qui prévoit un scotch sur le réglage focale de la paire de jumelles pour éviter que nous nous en servions pour estimer la distance, sur les colonnes des tapes et petits papiers que l’on doit ou pas avoir sur soi, et/ou sur le viseur (#usineàgaz), sur le pied à coulisse ou le cerclage bien entendu que personne, absolument personne ne pratique, et sur les tenues à porter ou ne pas porter, telle est question. On a eu chaud, on est pas passé loin de devoir porter le maillot de l’équipe de France par dessus les vêtements chauds, ou pire, par dessus les vêtements de pluie, tel le slip de Superman. #onrestecalme #woossa. Et l’arbitre accourant vers notre peloton, criant “Stop ! No ! Forbidden !” Mok Final rankingNos regards se croisaient alors, interrogeant notre base de données des choses interdites, dubitatifs au demeurant ; la juge terminant sa course s’essouffle pour nous dire “No cell phone”. Alors que nous étions aux résultats en cible, il ne s’agissait en fait que de la game boy de saisie des scores. Même les juges s’y perdent, c’est vous dire… Définitivement, le simple serait mieux pour tous. Après Redding, c’est incroyable comme vous constatez l’évidence de notre prise de tête sur les règlements que nous avons modifié, surtout chargé au fil des saisons. J’ai, et je pense nous, avons besoin de retrouver du tir à l’arc fun et plaisant, dans tous les cas plus simple. S’il le redevient, il touchera plus de monde, à commencer par nous-mêmes devenant à nouveau contagieux de notre passion (le coronarcheryus), et en touchant aussi un plus large public non initié à nos règles. Celles-ci devraient redevenir accessibles et peu nombreuses. J’ose croire encore que nos penseurs le verrons. Sinon, je veux bien les accompagner à la découverte de Redding pour redécouvrir une passion, qui peut-être fût-elle la leur un jour.

Team1Et voici le tir par équipe. Alors là, grosse découverte, exceptionnelle ! Si l’individuel me laisse perplexe avec ses duels, ce n’est pas le cas par équipe où il est évident que les matchs en échelle par poules seront plus difficiles à mettre en oeuvre, quoique… Bref, là, ce sont des duels équipe de trois contre équipe de trois. Sauf que là, les trois ne tirent pas la même machine : nous aurons un barebow featuring David Jackson le sage, double champion du monde en titre et élu archer de l’année en France ; le classique Jean-Charles Valladont (qui n’a rien de classique) vice champion olympique et champion du monde campagne ; et moi, noob à roulette, ex-number one in the world. Ca promet ! Ce qui est vraiment super en équipe campagne, c’est le timing. On peut prendre notre temps pour tirer une belle flèche, revenir si quelque chose se passe, plutôt que de tirer dans une tente loin derrière, ou une tante bref, d’une part c’est sécurisant, d’autre part c’est de la recherche de précision et non une question de rush. Sinon, allez faire du tir à l’arc sur circuit ou dans une piscine mais rendez moi mon plaisir merci. Mok podiumTrois minutes, les archers ne sont pas à la queue-leu-leu pour éviter les glissades façon X-games (ce qui peut arriver en FITA), nous sommes côte-à-côte et nous pouvons nous causer et nous encourager. L’ordre est libre et l’équipe me fait tirer en premier, les roulettes confirment la distance (même si en match, la distance est toujours connue). Ensuite vient le classique viseur et le barebow en dernier car il doit s’avancer sur le pas de tir dédié, 5 à 10 mètres plus proche. Une flèche par archer par cible, autant dire que cette flèche est importante. Ce ne sont donc que des flèches de barrage ! Géant, j’ai adoré ce moment. Nous remportons notre match contre  la Hongrie, et nous butterons sur les Allemands, vraiment très forts dans un gros match (cf tableau ci-joint). L’équipe de France sera alors engagée sur la médaille de bronze le jour même, ou le lendemain, on ne savait pas trop du fait du retard pris sur le nouveau format de l’individuel. Après une longue attente bien comprise par tous, les finales par équipes se tiendraient en fin d’après-midi.

Nous affrontons les italiens, pour moi, ce sont toutes de nouvelles têtes ou presque. Les disciplines ont du mal à se mélanger. Avec mes acolytes David et JC, tout va bien, l’échauffement sentait le brûlé avec tout le temps que nous avons eu avant d’entrer en scène devant le château, mais tout était ok. Le match se déroule à droite sur les cibles dans l’ombre, à gauche sur les cibles au soleil, toutes placées en contre-bas, de la plus courte à la plus éloignées, une taille de blason de chaque. Nous avons tiré mon bien-aimé le birdie 20, une gaz’ 30, une 60 à 45 et une 80 à 55m. Et bien, ce n’était pas facile du tout ! Encore une fois, le “pas loin pas dedans” m’a fait rager, mais cela avait toutefois l’avantage de rassurer mes coéquipiers sur mon réglage, la distance marquée, et l’engouement de l’équipe en général. Nous gagnons d’un petit point les italiens, au terme d’un match tenu de bout en bout. Ainsi je remporte ma première médaille internationale de tir en campagne après douze saisons d’équipe de France en tir à plat. Et dire que je n’ai jamais pu participer à un championnat de France de tir en campagne, et qu’il s’agissait là de mon sixième parcours seulement ! Grâce à David et JC, mais aussi grâce à toutes les astuces que m’ont transmis mes potes campagnards, j’ai pu vivre ce moment d’exception, déjouer les difficultés, être conforme au règlement en dépit de sa complexité, et réaliser une belle prestation qui me laissera un souvenir impérissable. Quelle belle équipe de France, neuf médailles au compteur, ramenées dans nos foyers. 

Mok médailleVoir la petite finale par équipe : https://youtu.be/sXGY1MzX9ZQ

Voir le reportage réalisé par France 3 Auvergne-Rhône-Alpes : https://youtu.be/J-Qn2pyBOaA


Ainsi s’achève cette ballade en forêt. Elle demande de la technique que le mécanicien a beaucoup apprécié, de la rigueur que le militaire a su appliquer, et du physique que le tir à plat a façonné depuis ces années. Uniquement du campagne ? Non, je ne crois pas que cela soit la bonne application. Un peu beaucoup de deux ? Oui, passionnément. J’aimerais découvrir des parcours plus faciles, pour performer, et des parcours vraiment difficiles, dans les deux cas pour jouer et profiter, me tester. Nous avons déjà cette richesse en France et si mon calendrier le permet, je n’hésiterais pas à avaler des kilomètres pour me rendre sur nos plus beaux parcours. Si seulement nous pouvions alléger notre règlement, le tir ne s’en porterait que mieux, notre visibilité aussi. Les distances connues uniquement ne me choqueraient pas pour rendre la discipline plus accessible en supprimant de facto les tergiversations autour de l’estimation interdite toutefois autorisée. Ou bien faire reconnaître le cerclage et le pied à coulisse comme des techniques exigeantes, demandant un réel effort de préparation, tel un travail sur soi et son équipement, où le meilleur sera récompensé à la fin. Ou encore la possibilité de prendre des photos durant la compétition, au lieu de jouer au chat et à la souris, s’il n’y a pas d’interdiction et que tout le monde est sur le même pied d’égalité, pas de triche possible, et tellement plus de partages de nos beaux parcours… Dans tous les cas, les techniques obscures ne font pas avancer, la pédagogie oui. Et s’il s’agissait de convaincre la plèbe que seule l’expérience permet d’acquérir la maîtrise, souvenez-vous alors le coût du matériel (les flèches cassées manquent lorsqu’elles sont achetées par douzaine, les flèches perdues nuisent à la santé de celui qui la reçoit), et souvenez-vous des 10’000 heures qui séparent le néophyte du maître. De quoi en décourager plus d’un, alors qu’il est question de grandir, autant mettre toutes les chances de notre côté, n’est-ce pas ? J’ai adoré écrire cet article, merci pour votre lecture ;-)

Archerycalement,

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